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Concert inoubliable de Béla Fleck et son groupe " My Bluegrass Heart " le 30 janvier 2024 à Maisons Alfort !

13-02-2024

Article rédigé par Bertrand Coqueugniot

4 commentaire(s) en bas de page..

crédit photo : Margaux Rodrigues
 crédit photo : Margaux Rodrigues 

30 Janvier 2024, Maison-Alfort, à 19h le parvis devant le Théâtre Debussy grouille déjà de monde, un monde impatient, fébrile, joyeux, d’ici peu les portes vont s’ouvrir et le Graal tant attendu sera à portée d’yeux et d’oreilles : Béla Fleck et son groupe My Bluegrass Heart donneront le seul concert français de leur tournée européenne.

Béla Fleck est une légende, un monstre sacré, un de ceux qui ont poussé plus loin les limites du banjo 5 cordes et pavé une voie dans laquelle se sont engouffrés bien d’autres…
L’homme a connu de multiples vies musicales et aujourd’hui c’est avec affection qu’il revient à ses premières amours, le Bluegrass. Enfin, un Bluegrass… « Made in »  Béla Fleck !

Dans la salle cosy du théâtre, passées les retrouvailles des uns avec les autres, une bonne partie du microcosme du Bluegrass français étant au rendez-vous, c’est un théâtre comble qui bruisse du plaisir à venir.

Après une sympathique première partie aux couleurs blues, Jontavious Willis, arrive enfin le « Cœur Bluegrass » du maestro. Ce sont de fines gâchettes qui l’entourent, Sierra Hull à la mandoline, le vieux compagnon de route Mark Schatz à la contrebasse, Brian Sutton à la guitare, Michael Cleveland au violon, et l’homme à tout faire, Justin Moses, au Dobro, en second banjo ponctuel et pas manchot, en partenaire au violon, et en lead singer secondé en cela par Sierra Hull.

 

crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues

D’entrée le ton est donné : on atteint des couches stratosphériques hallucinantes, pas de préambule, et si la musique de Béla Fleck couvre de multiples domaines, Bluegrass, Jazz, Classique, New Acoustic, que sa complexité est désarmante mais son écoute tellement limpide, son gang l’a parfaitement intégrée et c’est bien un groupe soudé et non un cumul d’individualités qui nous éblouit de titre en titre !
My Bluegrass Heart, revendique Béla Fleck… Certes, mais son coeur est un peu cœur d’artichaud, elles y sont plusieurs à l’intérieur, je parle des musiques bien sûr ! Il est clair que Bill Monroe ne reconnaitrait sans doute pas le genre musical qu’il a créé, mais pourrait être fier de ce qu’il a semé, ayant lui aussi, en son temps, amalgamé toutes ses propres influences.
Le flambeau a depuis été repris par de multiples groupes ou musiciens, Béla Fleck représentant l’un des plus beaux fleurons.

Deux heures, deux heures, c’est le temps pendant lequel les cinq musiciens nous ont embrasés par leur talent, leur créativité, leur joie de jouer tous ensemble et de faire corps avec leur leader, deux heures qui m’ont paru être cinq minutes. Béla est le boss, bien évidemment, mais il sait tellement mettre en valeur ses accompagnateurs que c’en est touchant. J’ai aimé le regard affectueux qu’il leur porte et qu’il reçoit en retour, j’ai ri à son petit « psssit, psssit » à un Justin Moses étourdi, lui montrant d’un coup d’archet imaginaire qu’il devait passer au violon pour le titre suivant !  
Une évidence, Béla Fleck est l’un du groupe, et à aucun moment il ne se montre en patron. Il dégage une simplicité, une forme de gentillesse, couvant ses comparses et communiquant avec le public avec un naturel amical. La marque des grands.

 

crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues
crédit photo : Margaux Rodrigues

Je ne révèlerai pas de scoop en disant que la salle comptait de nombreux musiciens, les yeux rivés qui sur le banjo, qui sur la mandoline ou la guitare, pour ne citer qu’eux, et le piège était de tomber dans le « décorticage » technique de chacun. Je suis évidemment tombé dans ce piège, suivant pas à pas les mains de Béla Fleck, comprenant de son jeu ce qu’il m’était possible de comprendre, et puis à un moment je me suis dit stop. Alors j’ai levé les yeux, me détachant de tout aspect technique pour embrasser le groupe dans son ensemble et me laisser porter par la musique. Il y avait de quoi faire un beau voyage…
J’ai été transporté par la fluidité de Sierra Hull et ses « chops » à la Sam Bush, les écheveaux guitaristiques de Brian Sutton, quel boulot il fait, les fondations solides de Mark Schatz, le brio de Justin Moses dont l’attaque des cordes de son Dobro rappelle un autre grand, et l’ébouriffant talent de Michael Cleveland. J’avoue que je n’aurais pas imaginé ce dernier dans ce casting de rêve, lui dont j’avais une image bien plus traditionnelle, et il m’a bluffé. Tous ces gens jouent la musique de Béla Fleck dont chaque titre est une pièce musicale à part entière, apportant leur Bluegrass à des œuvres qui n’en sont pas, ou pas vraiment.
Petit clin d’œil au Bluegrass plus classique, lequel n’est pas exclusivement un genre instrumental, deux chansons. Ce qui a permis de découvrir que Justin Moses a une sacrée voix façon High Lonesome Sound, décidément ce garçon sait tout faire et sans aucun ostentatoire ! Sierra Hull lui donne une belle réplique, et j’ai été amusé par le subtil changement de tonalité dans leur seconde chanson afin qu’elle soit confortable dans son propre lead ! Comme une lettre à la poste c’est passé !

Dans toute maison il y a l’architecte, le créateur, et le maitre d’œuvre. En cela Béla est formidablement secondé par Brian Sutton, pilier du groupe, ayant l’œil à tout, attentif à ce que tout roule parfaitement, ce qui laisse à son boss l’infinie liberté d’exprimer son art.
Et quel art… On sait tous depuis longtemps que Béla Fleck est unique, que sa musique est bien plus qu’une simple maestria au banjo, que son esprit nourri de multiples cultures musicales a engendré une créativité dont on ne voit pas les limites, et dont on se dit, avec gourmandise, « et après ? ». Si son cœur est « Bluegrass », c’est dans le sens que son terreau vient de cette musique, qu’il bat lorsqu’il est dans le partage avec autrui, musiciens ou public, et que sa joie fait plaisir à voir lorsque ces derniers lui renvoient de l’amour.

Je n’avais pas été plus conquis que ça par l’album « My Bluegrass Heart » car il me manquait l’essentiel, être en osmose avec les musiciens qui l’interprètent, en vrai, dans l’instant T, le vivre et le recevoir, un moment de catharsis… Ce 30 Janvier 2024, au Théâtre Debussy, toute une salle était en catharsis avec Béla Fleck et son Bluegrass Heart.

Ps : Merci à Marion Rodrigues, photographe officielle du festival pour les photos. Retrouvez son travail ici et un grand merci aussi au festival Sons d'hiver  https://www.sonsdhiver.org/

Commentaires

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Par Catherine Colleu
 le 15-02-2024 à 09:04
 - Merci Bertrand pour cet article qui raconte bien ce que la communauté Bluegrass française a vécu lors de cette soirée inoubliable !  
 
Par gégédblebass
 le 23-02-2024 à 21:09
 - Sans oublier une petite démonstration de clog par Mark Schatz ! 
 
Par grassmatinee
 le 01-03-2024 à 10:19
 - Merci Bertrand pour cet article, et pour l'aveu concernant le dernier opus du sieur Fleck. Il faut le voir et l'entendre en vrai pour commencer à l'apprécier vraiment... Et cette formation est moins instantanément aimable que NGR, mais ce qu'elle est flamboyante! 
 
Par grassmatinee
 le 01-03-2024 à 11:39
 - Merci Bertrand pour cet article, et pour l'aveu concernant le dernier opus du sieur Fleck. Il faut le voir et l'entendre en vrai pour commencer à l'apprécier vraiment... Et cette formation est moins instantanément aimable que NGR, mais ce qu'elle est flamboyante! 
 

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